Sustainable Developments Vol.9 No. 1

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Sustainable Developments
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COLLOQUE DU 10ème ANNIVERSAIRE DU PROTOCOLE DE MONTREAL 13 SEPTEMBRE 1997

Le Colloque du 10ème Anniversaire du Protocole de Montréal a eu lieu le 13 Septembre 1997 à Montréal, Canada, juste avant la Neuvième Réunion des Parties du Protocole de Montréal. Parrainé par Enviroment Canada , 3M et Nortel Inc., le Colloque devait mettre en présence plus de 300 personnes dont notamment, des délégués prenant part à la Neuvième Réunion des Parties, des spécialistes en sciences naturelles et sociales, des décideurs politiques, des représentants du monde des affaires et des ONG. Les participants au Colloque devaient passer en revue les progrès réalisés depuis la signature du Protocole en 1987 et mettre en exergue les enseignements tirés de ce processus susceptibles de servir à la poursuite de la mise en œuvre du Protocole et dans le traitement d’autres questions environnementales mondiales.

Sur la base des résultats du Colloque, une déclaration devait être élaborée et présentée à la Neuvième Réunion des Parties le 15 Septembre 1997. La déclaration, intitulée, "Enseignements tirés du Protocole de Montréal" souligne en particulier: le rôle vital des contributions scientifiques dans la mise en évidence de la menace qui pèse sur l’ozone et dans la sensibilisation à la nécessité de l’action; l’importance des mesures réalistes et des éléments de coopération dans la mise en œuvre du Protocole; la nécessité de l’innovation technologique au niveau des solutions; et, la valeur de la détermination objective des facteurs scientifiques, environnementaux, technologiques et économiques dans la réalisation du consensus.

COMPTE-RENDU DE LA REUNION

Durant ce colloque d’une journée, les délégués devaient entendre les déclarations thèmes de la Plénière d’ouverture, puis se sont répartis en trois sessions parallèles axées sur les sciences naturelles, les sciences sociales et la technologie, et participèrent enfin à une table ronde plénière sur les rôles interdépendants de la science, de la politique et de la technologie dans la réponse aux changements environnementaux mondiaux.

PLENIERE D’OUVERTURE

Le Président Clifford LINCOLN, Membre du Parlement Canadien, ouvrit le Colloque et déclara en substance que le Protocole de Montréal (PM) constitue un modèle de partenariat efficace entre les décideurs politiques, l’industrie, la communauté scientifique et les ONG, en cela qu’il a permis une prise de conscience mondiale. Il appela à un travail d'évaluation et à l'élaboration d'une synthèse des enseignements tirés du processus du PM.

Paule LEDUC, de l’Université de Québec, à Montréal, devait souligner, pour sa part, que le PM constitue un modèle international pour la mise en œuvre des protocoles, le développement scientifique en tandem avec les décisions politiques, la complémentarité des intérêts nationaux et privés et les contributions positives des médias. L'oratrice affirma par ailleurs que les universités ne sont pas des tours d’ivoire et qu’aucune discipline scientifique ne saurait se considérer comme complète; les sciences naturelles et sociales doivent coopérer pour une meilleure compréhension des aspects sociaux, politiques et scientifiques de problèmes tels que celui de l’épuisement de l’ozone.

Mario MOLINA, du Massachusetts Institute of Technology, parla de la chimie de l’ozone stratosphérique et passa en revue les accomplissements de la communauté scientifique dans la facilitation des négociations du PM. Il retraça les étapes du développement de la théorie de l’épuisement de l’ozone par les chlorofluorocarbones (CFC). Plusieurs théories scientifiques avaient été avancées pour expliquer l’épuisement constaté au niveau de l’ozone, mais la communauté scientifique finit par se rejoindre pour prouver qu’il ne s’agissait pas là d’un phénomène naturel, mais d’un phénomène causé par les rejets de CFC dans l’atmosphère.

S’appuyant sur les derniers développements dans ce domaine, MOLINA évoqua quelques unes des questions les plus communément posées figurant dans l’évaluation scientifique la plus récente de PM (1994). Il nota que les récentes données satellitaires ne laissent aucun doute que les CFC constituent la source dominante du chlore dans l’atmosphère. Il nota par ailleurs que la disponibilité des prélèvements de base des radiations UV à la surface de la terre, permettent désormais d'établir avec certitude une corrélation entre l’épuisement de l’ozone et l’accroissement des radiations UV. MOLINA ajouta que le trou de la couche d’ozone disparaîtra dans le futur, mais pas dans l’immédiat. L’ozone continue à s’épuiser bien que les concentrations de CFC soient aujourd’hui nivelées ou en baisse. Il fit état des tendances des diverses substances nocives à l’ozone (SNO) telles qu’une baisse du niveau du chlore, mais un accroissement continu inquiétant du brome.

MOLINA conclut en déclarant que bien que la communauté scientifique ait fait grand cas du processus du PM, plusieurs incertitudes demeurent concernant notamment les effets biologiques et effet des masses nuageuses. Fort heureusement, une action est entreprise en dépit de ces incertitudes. Malgré les challenges qui restent à relever , le PM constitue un exemple de la manière de faire face aux problèmes environnementaux mondiaux lorsque divers secteurs de la société travaillent ensemble.

Mostafa TOLBA, du Centre International de l’Environnement et du Développement, parla des innovations et des enseignements tirés du processus du PM. Les innovations ont inclus entre autres: la capacité d’ajuster les mesures de contrôle prévues dans le PM par des décisions à majorité des deux-tiers; la confidentialité des données et la définition des termes clés; l’accord par consensus plutôt que par amendement formel sur des questions telles que l’interdiction de l'augmentation des exportations des CFC par certaines Parties vers des non Parties; l’acceptation d’amendements au PM moyennant 20 ratifications seulement; l’établissement d’un Fonds Multilatéral pour le soutien de la participation de pays en développement ne disposant pas de plate-forme juridique pour le faire, dans la Convention de Vienne ou dans le PM; et, l’adoption de procédures applicables en cas de non observation des règles qui, en dépit de leur faiblesse, sont les premières mesures du genre à être incluses dans un accord environnemental international.

Les éléments clés de la réussite du processus du PM comprennent entre autres: la présence d’un noyau de pays favorables à l'élimination progressive des substances nocives à l’ozone (SNO) et à la mise en place du Fonds Multilatéral; le savoir-faire scientifique et technologique qui a facilité le consensus sur ce que pourrait être accompli; la volonté de coopérer pour faire avancer les choses; le rôle crucial de l’opinion publique; l’existence d’un médiateur neutre tel que le PNUE; le recours à des négociations officieuses tout au long du processus; et, l’assouplissement de la position rigide sur la souveraineté, qui a permis l’inclusion d’un mécanisme de mise en conformité dans le PM.

Les autres ingrédients de la réussite ont inclus: l’adhésion au principe des responsabilités communes mais différenciées, en vertu duquel les pays en développement ont pu bénéficier d’une plus grande flexibilité quant à la suppression progressive des SNO; l’égalité des voix accordées aux pays en développement et aux pays industrialisés dans la gestion du Fonds Multilatéral; le rôle de l’industrie dans la suppression progressive des SNO et dans la recherche des substituts; et la présence de personnalités fortes qui ont aidé à faire avancer les négociations, à des moments cruciaux. TOLBA souligna en guise de conclusion que les innovations et les enseignements tirés du PM pouvaient guider les futures négociations environnementales internationales.

LES SESSIONS PARALLELES

Le Colloque s'articula en 3 sessions parallèles axées sur les sciences naturelles, les sciences sociales et la technologie dont chacune comporta trois panels consécutifs.

LA SESSION SUR LES SCIENCES NATURELLES

Les objectifs de la session axée sur les sciences naturelles étaient de faire le point des connaissances concernant les effets de l’accroissement des radiations UV-B sur les écosystèmes et sur la santé humaine, de faire la synthèse des mesures d’adaptation et d’atténuation, et, d’évaluer le rôle des études scientifiques dans la mise en œuvre du PM.

Les Effets sur les Ecosystèmes: Le premier panel des sciences naturelles fut présidé par John CAREY, du Canadian Water Research Institute. James KERR, du Canadian Stratospheric Ozone Research and Monitoring Program, parla de l’évolution climatique et de ses rapports avec les radiations UV. Il déclara que les récentes recherches satellitaires confirment que le trou dans la couche d’ozone a provoqué entre 1979 et 1992 un accroissement des niveaux maximum et moyen des radiations UV. L’intensité des radiations UV-B a également augmenté de manière importante, mais n’a pas exercé d'effets sur les ondes longues des radiations UV-A. Il conclut en disant que des mesures à long terme et un réseau mondial en expansion de centres de données soutiennent le PM et peuvent améliorer la compréhension des UV de surface en tant que variable clé dans le suivi des effets de l’épuisement de l’ozone.

Robert WORREST, du Consortium for International Earth Science Information Network, résuma les effets des radiations UV-B sur les systèmes aquatiques. Il parla du rôle critique des systèmes marins dans le cycle du carbone et la haute latitude de fixation par le phytoplancton de la moitié des quantités de dioxyde de carbone produites dans le monde. Une réduction des capacités d'élimination du carbone dans les océans, due au déclin des taux d’ozone, peut aboutir à un réchauffement de la planète. La recherche qualitative indique que les UV-B sont un facteur de stress pour beaucoup d’écosystèmes aquatiques et qu'ils peuvent provoquer une baisse des récoltes alimentaires, de la fixation du nitrogène par les algues bleues-vertes et de la production de la biomasse et ce, en dépit de la capacité des organismes à réparer les dégâts causés par les UV-B.

Menfrid TEVINI, de l’Université de Karlsruhe, parla des effets des UV-B sur les plantes et les écosystèmes terrestres. Il nota que les radiations UV-B endommagent les molécules végétales telles que l’ADN et les régulateurs de croissance. Il décrivit les programmes expérimentaux en cours utilisant les chambres de croissance, les serres et autres parcelles opérées par simulation de la lumière solaire et de l’accroissement des radiations UV-B. Les résultats obtenus à ce jour montrent que l’augmentation des UV-B n’exerce pas le même impact sur toutes les plantes et toutes les espèces cultivées et qu'ils peuvent induire des mécanismes d'auto- réparation comme la pigmentation protectrice. Les UV-B ne semblent pas diminuer les récoltes de maïs ou de riz. Les UV-B affectent les changements au niveau de la forme des plantes, au niveau du temps de floraison, de la production des graines et des réactions chimiques secondaires, lesquelles affectent à leur tour l’équilibre compétitif entre les espèces, la biodiversité, le régime herbivore, les maladies, le cycle nutritionnel, les récoltes alimentaires et la qualité des aliments.

Mohammed ILYAS, de l’Université des Sciences de Malaisie, examina le point de savoir si les pays tropicaux seront touchés et demanda qui doit supporter les fardeaux économiques. Il affirma que l’accroissement prévu des niveaux des radiations UV dans les tropiques était susceptible de dépasser les niveaux généraux enregistrés actuellement dans les hautes latitudes. Les participants du panel devaient discuter ensuite de la logique politique erronée selon laquelle le PM aurait régulé les CFC et résolu ainsi le problème du trou dans la couche d’ozone. Tous étaient d’accord sur la nécessité du financement d’une recherche sur les tendances des effets biologiques.

Les Effets sur la Santé Humaine: William COYNEM, de 3M, présida ce panel. Edward deFabo, du Centre Médical de l'Université George Washington, parla des implications de la déficience immunitaire due aux UV sur la santé humaine, à la lueur de l'augmentation des radiations UV-B prévue dans les décennies à venir. Il déclara que les expériences menées sur les rats montrent que le dosage des UV-B est susceptible d’enclencher des cellules T et de provoquer la suppression du système immunitaire chez les humains.

Jan VAN de LEUN, de l’Hôpital Universitaire d’Utrecht, mit l’accent sur les effets des radiations UV-B sur la peau et les yeux. Il nota la complexité des effets de ces radiations sur les humains qui impliqueront des processus d’adaptation, de défense, de réparation et de suppression. Les recherches dont on dispose suggèrent que les UV-B provoqueront entre autres: une diminution des carences en vitamine D; une augmentation des cancers de la peau autres que les mélanomes, un vieillissement de la peau et des cécités par réverbération; qu'ils n’affecteront ni la pigmentation ni la photosensibilité de la peau; et qu'ils auront des effets incertains sur les cancers de la peau, les cataractes et les maladies infectieuses.

Ann O’TOOLE, Environment Canada, présenta l'Index UV Canadien comme un outil au service de la réponse publique à l’augmentation des radiations des UV-B. Elaboré en 1992, l’Index UV est conçu pour la mesure, le suivi et la prévision des radiations UV-B de surface et pour la transmission des informations scientifiques au public, aux fins de faciliter la compréhension du problème de l’épuisement de l’ozone et les risques de santé qui s’y rapportent et l'adaptation à la situation. Il est inclus dans les prévisions météorologiques quotidiennes et dans le bulletin de l’Index UV qui explique les risques associés aux différentes intensités et fournit des conseils quant à la manière de se prémunir des méfaits du soleil. Les enquêtes publiques montrent que 75% du public Canadien connaissent l’Index UV et que plus de 50% en tiennent compte en choisissant de prendre des mesures de protection supplémentaires. L’oratrice conclut en indiquant que l’Index UV pourrait être utilisé par d’autres pays ainsi que par différentes organisations internationales.

Dans la suite de la discussion, les participants devaient s’accorder pour dire que le problème des UV-B n’est pas traité de manière adéquate par le PM et que davantage d’études des risques, un meilleur suivi des UV de surface et des recherches sur leurs effets restaient essentiels. Un participant souligna la nécessité de sensibiliser le public quant à ses responsabilités en tant que consommateur de produits contenant les CFC.

Les Enseignements Pouvant Contribuer à la Réussite de l'Evaluation Scientifique: Ce panel fut présidé par Pieter AUCAMP de Ptersa. Daniel ALBRITTON, de l’US National Oceanic and Atmospheric Administration, discuta des études qui ont permis la compréhension scientifique de l’ozone atmosphérique et de leur contribution dans le processus du PM. Il souligna que ces études sont: basées sur l’expertise scientifique plutôt que sur celle des décideurs; revues par les pairs; et, élaborées pour les gouvernements, le public et l’industrie. Les études menées en 1987, 1989, 1991 et 1994 ont permis une meilleure prise de conscience du problème et de l’étendue du trou dans la couche d’ozone causé par les CFC au-dessus de l’Antarctique. La tendance à la baisse de l’ozone mondial et l’augmentation des radiations UV-B nocives qui devaient mener respectivement à la négociation du PM, à l’amendement de Londres sur l'élimination progressive des CFC, à l’accord de Copenhague sur l’accélération des processus d'élimination et à l'ajustement des plus hauts niveaux admis par la Convention de Vienne pour les autres substances nocives à l’ozone. L’expérience du PM suggère que les divers problèmes environnementaux mondiaux ont des horizons différents nécessitant des réponses politiques différentes. L’orateur souligna que le traitement d’un problème environnemental passe par trois phases: la crédibilité de l’étude scientifique; la gestion des alternatives; et, la responsabilisation de la science et de la politique. Il suggéra que les négociations sur le réchauffement de la planète peuvent tirer un enseignement du processus du PM, à savoir, la reconnaissance que la science et la politique sont des processus itératifs et complémentaires qui n'apportent ni réponses finales ni actions définitives. Il nota que les négociations sur le réchauffement du globe sont confrontées à des facteurs économiques et industriels de grande échelle et aux problèmes bien plus complexes consistant à trouver des substituts au carbone.

Gordon McBEAN, du Canadian Atmospheric Environment Service, déclara que la crédibilité et le consensus de la science internationale, ainsi que les synthèses d’évaluation fournies aux décideurs politiques ont été d’importance capitale pour le processus du PM. Il souligna que l’épuisement de l’ozone et le changement climatique ne sauraient être appréhendés comme des problèmes séparés et que le suivi de l’ozone et de la chimie atmosphérique peuvent améliorer la compréhension du réchauffement de la planète.

Rumen BOJKOV, de l’organisation Météorologique Mondiale, nota qu’en dépit du pic et du déclin consécutif des niveaux de CFC, l’ozone a continué et continuera à décliner. Les études scientifiques récentes font état d’un déclin important au niveau de l’ozone polaire qui a atteint son apogée au cours de l’hiver de 1997 et qui pourrait avoir été causé par les changements climatiques.

Dans le débat final, les participants s’accordèrent pour dire que les problèmes liés à l’ozone et aux UV-B sont loin d’être résolus et que la phase de responsabilisation actuelle nécessite en 1998 une évaluation qui examinera les tendances en matière de CFC et les possibilités de récupération, compte tenu des dynamiques qui caractérisent la couche d’ozone et l'évolution climatique.

SESSION SUR LES SCIENCES SOCIALES

Les objectifs de la session sur les sciences sociales consistait à étudier l’utilité de l’adoption du PM et du processus évolutif en tant que modèle pour d’autres accords environnementaux internationaux, et à réfléchir sur le contenu et sur la mise en œuvre du PM pour s’assurer de la poursuite de son succès et pour y apporter les améliorations jugées nécessaires.

Nouveaux Modèles Juridiques ?: Winfried LANG, Ambassadeur Autrichien auprès de la Belgique, présida le premier panel. Il nota que le PM était l’une des pierres angulaires de l’édifice de la législation environnementale internationale, qui se distingue par des traits importants tels que la flexibilité, le mécanisme de conformité, la reconnaissance des responsabilités différenciées et des mesures commerciales en guise d’incitation à la participation.

Patrick SZELL, du Département de l’Environnement du Royaume-Uni, parla de la conformité au PM et indiqua que l’Article 8, avec ses dispositions d’examen rapproché de la conformité n’a pas d’équivalent dans l'arsenal des lois environnementales internationales. Il nota cependant qu’il était nécessaire de s’assurer de la soumission de données adéquates par les Parties, bien que cela ne suffirait pas à garantir la conformité. Il ajouta que le modèle de conformité du PM est structurellement rationnel, mais qu’il risquait de ne pas être approprié pour d’autres régimes environnementaux internationaux, comme celui du changement climatique, qui semble nécessiter un processus consultatif multilatéral de conseil plutôt que de supervision.

Duncan BRACK, du Royal Institute of International Affairs du Royaume-Uni, parla des dispositions commerciales du PM. Il nota que, contrairement à d’autres accords environnementaux multilatéraux (AEM), tels que la CITES et la Convention de Bâle qui utilisent des mesures commerciales pour le contrôle du commerce des substances dangereuses pour l’environnement, les restrictions commerciales dans le PM visent à prévenir la resquille et à assurer l’efficacité du régime. Les dispositions commerciales du PM interdisent le commerce entre les Parties visées et les Parties non visées dans 3 catégories de produits: les substances nocives à l’ozone (SNO); les produits contenant des SNO; et les produits fabriqués avec des SNO mais qui n’en contiennent pas. La restriction du commerce des marchandises qui se rapportent à cette dernière catégorie s’est avéré particulièrement difficile. BRACK nota qu‘avant que des mesures commerciales similaires à celles du PM puissent être utilisées dans d’autres régimes, les questions de leur faisabilité, de leur justesse et de leurs liens avec le système commercial multilatéral doivent être examinées.

Peter SAND, de l’Université de Munich, nota que le régime du PM a joué du bâton et de la carotte pour encourager la conformité, le bâton étant les procédures officielles de mise en conformité, et la carotte, les subventions du coût marginal fournies à travers le Fonds Multilatéral. Il fit également remarquer que la doctrine traditionnelle de l’égalité souveraine des Etats était désormais tempérée par celle des responsabilités communes mais différenciées qui "permet à certains pays de payer pour que d’autres se mettent en conformité". Il fit part de sa réserve quant à la pratique récente de la Commission chargée de la Mise en Œuvre du PM consistant à trouver que certains pays sont en conformité, rien que pour demeurer éligibles aux subventions du coût marginal fournies à travers le Fonds Multilatéral. SAND nota qu’une telle "redéfinition consensuelle des normes du traité" risquait d’affaiblir son efficacité.

Dans le débat qui s’ensuivit, les participants examinèrent le rôle potentiel de la politique du bâton et de la carotte dans la mise en application du régime du changement climatique, le contrôle des marchés noirs qui sont en train de naître pour les SNO dans certains pays industrialisés, et, l’adoption du mécanisme de règlement des différends de l’OMC comme modèle potentiel de mise en conformité dans les AEM.

Nouveaux Modes de Coopération Entre les Pays en Développement et les Pays Industrialisés ?: Le second panel des sciences sociales fut présidé par Omar EL-ARINI, du Secrétariat du Fonds Multilatéral. Juan Antonio MATEOS, du Département des Affaires Etrangères du Mexique, mit en exergue les facteurs ayant contribué à la réussite du PM. Il nota que des compromis auparavant impensables ont été réalisés durant les négociations du PM, tels que les décisions d’établir le Fonds Multilatéral, d’accepter le principe " un Etat, une voix " dans les décisions qui le concernent, et d’avoir un nombre égal de représentants des pays industrialisés et des pays en développement au sein du Conseil Exécutif chargé de la gestion du Fonds.

Ashok KHOSLA, de Development Alternatives, nota qu’une coopération authentique devrait pouvoir donner lieu à une situation où toutes les Parties seraient gagnantes, plutôt que de devenir une proposition ou le Sud y ferait figure de perdant. Il nota que le PM a reflété un certain degré de coopération authentique, mais qu’il a une valeur limitée en tant que modèle pour d’autres négociations, parce que le PM traite d’un problème relativement bien défini pour lequel des solutions techniques plutôt que des changements majeurs de styles de vie sont suffisantes. Ceci n’est pas nécessairement le cas avec les changements climatiques ou la biodiversité. Dans ce débat sur la coopération, KHOSLA compara le processus de négociation mondial à un jeu de casino où le Sud ne peut ni gagner ni sortir à jeu, où les gagnants changent continuellement les règles du jeu, y compris pendant la partie, et où aucun joueur ne peut choisir de ne pas jouer. KHOSLA nota qu’on devrait avoir, au lieu de cela, un régime idéal de coopération où le Sud pourrait participer à l’établissement de l’ordre du jour.

Victor BUXTON, Environment Canada, nota que le PM pourrait être considéré à partir de plusieurs perspectives, mais qu’on se trompe en disant que les problèmes ont été aisément traités. Compte tenu de l’absence d’un consensus scientifique ou économique sur les questions clés touchant à l’épuisement de l’ozone pendant la négociation du PM, et compte tenu des différences entre l’UE, les USA et le monde en développement, et en leur sein même, l’accord fut une bataille durement gagnée. Il indiqua aussi que le "consensus ne signifiait pas l’adhésion à un seul point de vue, mais signifiait plutôt que les pays souhaitaient parvenir à un compromis et édifier des partenariats.

Dans le débat qui s’ensuivit, les participants devaient aborder, entre autres, le rôle de l’industrie dans un système multilatéral idéal et la nécessité de dépasser la bipolarité Nord-Sud qui caractérise la coopération en matière d’environnement.

Un Nouveau Modèle pour la Négociation et l’opération des Régimes Internationaux ?: Ce panel fut présidé par David RUNNALLS, de l’Institut International du Développement Durable.

Richard BENEDICK, du World Wildlife Fund, mit en exergue les éléments qui confèrent au PM son influence sur le système évolutif de la gouvernance environnementale mondiale. Ces éléments comprennent entre autres, les éléments novateurs du processus de négociation, tels que: le recours à des consultations officieuses; le rôle pivot de la science; le caractère dynamique du régime; le cadre institutionnel élaboré qui s’est développé autour du PM, incluant les groupes de travail exécutifs, les panels d’évaluation technique, la Commission chargée de la Mise en Œuvre, et, les réunions des Parties qui se tiennent une fois par an; la foi dans les mécanismes de marché inhérents au traité ; sa sensibilité aux questions d’équité ; et le stimulus qu’il fournit au développement d’un réseau mondial d’ONG.

Edward PARSON, de l'Université d’Harvard, qualifia le PM de premier régime environnemental international d’adaptation qu'aura connu le monde et mit en relief les enseignements tirés de l’expérience du PM. Parmi ces derniers : la nécessité de mettre en place un processus susceptible de ne pas être déstabilisé par les difficultés rencontrées par les pays indivividuels ; la reconnaissance que les premières estimations des coûts et des préjudices sont typiquement peu fiables ; et, la reconnaissance que les quelques premières mesures régulatoires sont les plus faciles à prendre. Il nota la nécessité d’avoir des objectifs régulatoires intérimaires, judicieusement sélectionnés et capables d’engendrer l’intérêt des Parties à œuvrer pour leur réalisation. Le dernier enseignement, suggéra-t-il, est qu’une conformité totale au régime reste peu probable mais qu’un régime d’adaptation doit être en mesure de persister en dépit des échecs et des défaillances.

Marvin SOROOS, de l’Université d’Etat de la Caroline du Nord, parla du point de savoir si la Quatrième Conférence des Parties de la Convention-Cadre sur les Changements Climatiques, qui se déroulera à Kyoto, serait pour le régime des changements climatiques ce que le Protocole de Montréal a été pour le régime de l’épuisement de l’ozone. Il fit part de son scepticisme que cela puisse en être ainsi, et ce, pour un certain nombre de motifs, y compris en raison de la position prise par les USA.

A l’opposé de son engagement en faveur d'une régulation des SNO dans le PM, les USA semblent réticents à tout accord sur un calendrier strict pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Par ailleurs, le régime de l’ozone nécessite, de par sa nature même, une action préventive, alors que d’autres approches telles que l’évitement, l’action défensive ou l’atténuation des effets nocifs sont probablement plus adaptées au régime des changements climatiques, étant donné qu’elles semblent du point de vue à la fois économique et technologique plus attrayantes que l’approche préventive.

Dans le débat qui suivit, les participants abordèrent le rôle des multinationales dans le processus du PM, la question de savoir si le PM encourage les mécanismes de marché, et enfin, ce qu’un participant qualifia de précédent dangereux établi par le régime de l’ozone, où les alternatives des CFC risquent d’exacerber les changements climatiques et d'avoir des effets potentiellement nuisibles à la santé humaine.

SESSION SUR LA TECHNOLOGIE

L’objectif de la session sur la technologie était de déterminer le rôle de l’industrie, des technologies et de l’économie dans les progrès réalisés au niveau de la protection de la couche d’ozone et leur importance pour la réussite du PM dans les pays industrialisés et dans les pays en développement.

Les Leçons Tirées de la Réussite du Développement Technologique : Le premier panel sur la technologie fut présidé par Lambert KUIJPERS, de la Dutch Technical University, Eindhoven.

Suely CARVALHO, de l’Unité chargée du PM au sein du PNUD, souligna l’importance de l’évaluation technologique pour le PM et évoqua les liens du Panel sur l’Evaluation Economique et Technologique (PEET) et ses 7 Commissions sur les Options Techniques (COT) avec le PM. L’oratrice attribua l’efficacité du PEET à l’avènement d’une responsabilité environnementale dans le monde de l’entreprise, à l’objectivité de ses experts volontaires, et à sa portée mondiale. Elle dressa la liste des réalisations du PEET qui englobent les technologies durables, l’innovation industrielle et le leadership des gouvernements et des industries. Les leçons apprises du PEET mettent en lumière l’importance du travail d’équipe, du respect mutuel, de la motivation et du stimulus, et suggèrent que les solutions simples doivent être recherchées en premier.

Robert Van SLOOTEN, du Département de l’Environnement du Royaume-Uni, parla de la structure du PEET et en souligna les principes et les résultats. Il expliqua que le PEET prépare pour les Parties du PM des rapports techniques de pertinence politique et mit l’accent sur l’expertise technique du PEET, sa composition internationale, son indépendance et son objectivité qui sont les ingrédients clés de son efficacité.

Radhey AGARWAL, de l’Indian Institute of Technology parla de la Commission sur les Options Techniques chargée de la Réfrigération, de la Climatisation et des Pompes à Chaleur, et attribua son succès à son objectivité, à sa structure décisionnelle basée sur le consensus et à sa focalisation sur les technologies efficaces et réalisables.

Laszlo DOBO, du Ministère Hongrois de l’Environnement et des Politiques Régionales, parla du groupe d'étude chargé des Pays en Transition Economique (PTE) mis en place par le PEET. Ce groupe d'étude a fourni aux PTE des données sur la production et la consommation des SNO, l’estimation des coûts marginaux de leur élimination progressive, des calendriers réalistes, des méthodes pour le traitement des cas de non conformité assorties d'une assistance accordée également aux PTE qui ne sont pas Parties prenantes.

Sally RAND, de l’Agence US de la Protection Environnementale, parla du rôle du PEET dans la coopération technologique et souligna l’importance du réseau des "ambassadeurs techniques" du PEET qui ont renforcé la coopération , la transition technologique et les solutions basées sur la synergie. Ces experts sont influents parce qu'ils participent dans les commissions techniques et politiques, fournissent l’information technique pertinente à la politique, occupent des postes décisionnels dans le monde de l’industrie et du commerce et sont les instigateurs des évolutions technologiques.

Helen TOPE, de l'Australian Environment Protection Authority, souligna que le PM s'appuie sur l'objectivité des rapports du PEET qui fournissent des informations techniques politiquement pertinentes, bénéficient d'une participation importante de l'industrie, et qui font la distinction entre considérations techniques et considérations commerciales et politiques.

Jonathon BANKS, de l’Organisation du Commonwealth de la Recherche Scientifique et Industrielle, parla de la Commission sur les Options Techniques chargée du Bromure de Méthyle et des problèmes particuliers en rapport, y compris: son utilisation répandue dans l’agriculture; l’absence d’enjeux industriels dans le développement des alternatives; et, les opinions polarisées des membres de la COT qui ont fini par déstabiliser le processus de contrôle des SNO.

Ashley WOODCOCK, de l’Hôpital de Wythenshawe, décrivit la Commission sur les Options Techniques chargée des Aérosols et évoqua la tension entre la nécessité d’avoir des alternatives sans aérosols pour les inhalateurs à dosage gradué (pour les asthmatiques) et l’importance de la protection de la sécurité de ces malades.

Walter BRUNNER, Envico AG, évoqua les facteurs contribuant à l'élimination progressive des "halons" dont: l’adaptabilité du secteur de la protection civile en fonction de ces services plutôt qu’en fonction du produit, de nouvelles opportunités de marché pour les fabricants et des exemptions pour les utilisations essentielles.

Dans la discussion qui suivit, les participants: soulignèrent les limitations imposées par l’inadéquation des financements destinés aux pays en développement; mirent l’accent sur la nécessité d’apporter des améliorations au modèle du PM pour qu’il puisse servir à d’autres processus, et mirent en relief l’importance des réponses spécifiques des différents secteurs pour la mise en œuvre du PM ainsi que les avantages potentiels de cette approche pour le traitement de la biodiversité et des changements climatiques.

Les Mesures Economiques et Industrielles à la Base du Succès du Protocole: Ce panel fut présidé par Robert Van SLOOTEN du Département de l’Environnement du Royaume-Uni.

Jim ARMSTRONG, Environment Canada, donna un bref aperçu sur l’étude conduite par Environment Canada sur les coûts et profits associés au PM durant la période 1997-2060. Les profits pris en considération englobent l’évitement des divers effets négatifs sur la santé ainsi que les profits économiques liés à réduction des préjudices susceptibles d’être subis par les ressources forestières et agricoles et les écosystèmes aquatiques. Les coûts englobent les frais de recherche et de développement que nécessiteront les alternatives, les frais liés aux capitaux nécessaires à l’évolution des processus et services, et les coûts supplémentaires liés à l’environnement, au travail, à l’énergie et aux moyens matériels associés à l’utilisation des alternatives. Les coûts, surestimés au départ, se sont avéré moins élevés que prévu car la flexibilité introduite au niveau de la mise en œuvre, le transfert technologique et la coopération industrielle ont permis de maintenir les coûts de l’ajustement à un niveau peu élevé. L’étude a ainsi conclu que la société réalisera des profits importants à partir du PM et que le succès du Protocole est dû, entre autres, à l’accord grandissant sur la question des profits; à la plate-forme scientifique et technologique; à la focalisation sur les objectifs plutôt que sur les instruments; à la prise en considération des différences que présentent les pays; et enfin, à la coopération et au transfert technologique.

Elizabeth COOK, du World Resources Institute, évoqua les enseignements tirés de l'élimination progressive des CFC aux USA. Utilisant les équipements de refroidissement et les solvants comme exemples, elle nota que l’adaptation technologique fut plus rapide et moins coûteuse que prévue au départ, et qu’elle finit par permettre la réalisation de gains importants au niveau de l’efficience. Les leçons retenues de ces cas instruisent que: des objectifs environnementaux ajustables sont cruciaux; l’utilisation d’instruments économiques permet une grande flexibilité et une baisse des coûts; les initiatives gouvernementales novatrices peuvent aplanir les obstacles dressés devant les solutions efficaces du point de vue coûts; l’industrie innovera sous l'impulsion des profits que permettra la concurrence; et, que les estimations pré-régulatoires exagèrent souvent les coûts réels.

Jorge CORONA, de la Commission Mexicaine chargée de l’Environnement, et José PONS, de la Spray Quimica CA, parlèrent du leadership de l’industrie dans le domaine de la protection de l’ozone dans les pays en développement. Ils soulignèrent que le caractère hétérogène des pays en développement, les diverses utilisations des SNO et les différentes tailles et parts de marché des industries particulières rendent impossible la définition d’une seule stratégie efficace pour l'élimination progressive des SNO dans l’ensemble des pays en développement et dans tous les secteurs industriels. Toutefois, dix années d’expérience avec le PM ont enseigné que: les gouvernements, les ONG et les industries peuvent agir en tant qu’agents d’innovation et de motivation; des économies peuvent être réalisées dans bon nombre de cas; les entreprises sont poussées à l’innovation sous les pressions que peuvent exercer la consommation et/ou la concurrence; et, les financements sont disponibles pour l'élimination progressive des SNO. Les orateurs soulignèrent par ailleurs qu'il est important pour les pays en développement de ne pas attendre encore 10 ans pour supprimer les SNO, car l’augmentation des niveaux d’émissions associée à la croissance continue engloutiront les profits réalisés au niveau de la protection de l’ozone.

Le Leadership des Compagnies Multilatérales: Le dernier panel sur la technologie fut présidé par David CATCHPOLE, de la British Petroleum Exploration Alaska, Inc.

Margaret KERR, de Nortel Inc., parla de l’avantage compétitif réalisé à travers le leadership des entreprises dans le domaine de l’environnement. Elle souligna que la protection environnementale n’est pas simplement une bonne chose à faire, mais qu'elle se traduit en avantages compétitifs dans les domaines des coûts opérationnels qui s’en trouvent diminués, des produits et des services qui s’en trouvent différenciés, et de l’image de l’entreprise qui s’en trouve rehaussée. Plus important encore, elle valorise l'entreprise aux yeux de la clientèle. Elle évoqua le progrès dans les esprits concernant la gestion environnementale qui fait qu’on soit passé de la pratique du contrôle après coup à celle d'une prévention en amont, en se basant sur des principes de gestion qualitative. Elle affirma que la coopération internationale entre les gouvernements et l’industrie constitue un moyen pratique pour résoudre les problèmes environnementaux communs. Elle nota que la coopération technologique a été pour Nortel un important outil de marché ouvrant la voie à la bonne volonté et permettant d’établir de fortes relations avec la clientèle dans les nouveaux marchés.

Yuichi FUJMOTO, de la Conférence Industrielle Japonaise pour la Protection de la Couche d’Ozone, parla des réalisations de la Leadership Initiative de la Thaïlande, du Corporate Pledge du Viêt-nam et de l’Accord Mondial sur les Semi-Conducteurs, et mit en lumière les enseignements tirés de ces initiatives: le leadership et la coopération mondiale sont vitaux dans la mise en œuvre des accords environnementaux; des plans d’action devanciers et à l’initiative de l’industrie sont essentiels et fructueux; et, la coopération entre gouvernements et industries est capitale.

Stephen ANDERSEN, de l’Agence US de la Protection Environnementale (EPA), déclara que la réussite du PM dépendait du travail des "champions" de la protection de la couche d’ozone. L’EPA a sélectionné 71 champions qu’il a honorés en leur accordant la "meilleure des meilleures palmes de la protection stratosphérique".

Thomas MOREHOUSE, de l’Institute for Defense Analysis, et Gary TAYLOR, de la Taylor/Wagner Inc., présentèrent une synthèse des discussions du panel, soulignant l’importance des efforts fournis par des individus et des entreprises exceptionnels et la capacité de transcender les frontières géographiques à travers la coopération. Le challenge consiste à rassembler toutes ces parties pour forger des solutions novatrices aux problèmes environnementaux de la planète.

DEBAT DE TABLE RONDE

Après les sessions parallèles, les participants se sont engagés dans un débat de table ronde plénière sur les rôles interdépendants de la science, de la politique et de la technologie dans les questions environnementales mondiales. Elizabeth DOWDESWELL, Directeur Exécutif du PNUE, anima le débat. Elle l’ouvrit en posant la question de savoir si l’interdépendance des questions scientifiques, technologiques, sociales et économiques était réalisée dans le processus du PM et quels enseignements pourraient être transposés à d’autres problèmes environnementaux mondiaux. Trois panélistes devaient ensuite présenter des remarques introductives.

Robert WATSON, de la Banque Mondiale, déclara que bien que la science, la technologie et l’économie jouent des rôles critiques dans les débats sur l’ozone, le climat et la biodiversité, ce sont la politique et la volonté politique qui seront la force dominante dans la négociation des accords environnementaux mondiaux. La preuve scientifique de l’épuisement de l’ozone fut un élément central dans l’engendrement de l’intérêt public pour le processus de l’ozone mais il n’y a pas eu d’intérêt public équivalent pour le changement climatique et la biodiversité. L’orateur déclara que le processus du PM a été un succès mitigé. Aucune action n’a été entreprise avant que les relations de cause à effet ne fussent établies et ainsi le principe de prévention ne fut appliqué que de manière marginale. L’expérience du PM a démontré que si la période de temps nécessaire à inverser le préjudice est longue, comme c’est le cas pour les changements climatiques et la biodiversité, le principe de prévention doit être appliqué. Il ajouta qu’il n’y a aucune raison d’être auto-satisfait à propos du réchauffement de la planète, d’autant plus que des solutions de bons rapports coûts/efficacité sont actuellement disponibles.

Maneka GANDHI, ancien Ministre Indien de l’Environnement et des Forêts, proposa que le Secrétariat du PM s’active à alimenter la recherche politique et appela à des mesures de soutien en faveur des petites et moyennes entreprises pour contrecarrer la marginalisation des pays concernés par l’Article 5. Elle affirma que les accords sur le partage équitable du fardeau des coûts n’ont pas été honorés, en partie en raison des procédures incommodes du Fonds Multilatéral et des manières dont les concepts de coûts marginaux, de renforcement des capacités et de transfert technologiques sont appliqués. Les coûts supplémentaires nécessaires à l'élimination progressive des CFC, aux expériences sur terrain et aux nouvelles industries de conversion locales doivent être considérés comme des coûts marginaux. Le développement des capacités doit renforcer l’aptitude des pays en développement à identifier et à négocier de manière scientifique les solutions justes. Elle ajouta que les options liées au transfert technologique doivent être élargies aux alternatives touchant aux HCFC et à l’aérosol.

Steven ANDERSON, Association of Fluorocarbon Consumers and Manufacturers, parla des enseignements que lui-même, en tant que représentant de l’industrie, a tirés du processus du PM, le plus important étant que le processus de négociation est une propriété commune. Il rappela les premières réunions sur la question de l’ozone, durant lesquelles les pays et les groupes d’intérêt formaient un certain nombre de "camps" séparés. Les négociations du PM ont révélé qu'il est important d’avancer pas à pas, plutôt que de chercher à édifier un système parfait dès le départ. Nonobstant ces enseignements, ANDERSON pense que le PM est un succès mitigé.

DOWDESWELL demanda ce que le PM et les Parties prenantes pourraient faire aujourd'hui pour améliorer le processus du PM. Les panélistes et les participants mirent l'accent sur: le renforcement des capacités; l’importance de l’équité; la nécessité d’agir plus rapidement; le besoin d’accorder une plus grande attention à l'élimination progressive de la production et à prévenir en même temps le marché noir en aidant à la suppression progressive de la production et de la consommation des SNO dans les pays en développement; et, la nécessité de revoir la manière dont les financements sont exécutés.

Un participant exprima sa préoccupation quant au manque de soutien en faveur de la coordination de la recherche sur les effets des radiations UV et appela à un plus grand investissement dans l’étude des implications économiques et sociales d l’évolution climatique. Il fut noté qu’un processus d’apprentissage était en cours dans le domaine des méthodes et des stratégies de recherche sur les différents problèmes environnementaux mondiaux, mais que les liens entre les divers secteurs (par exemple, l'eau, la biodiversité et le climat) doivent être aujourd'hui reconnus et que les politiques, technologies et pratiques qui traitent de ces liens doivent être mises en œuvre.

L’un des observateurs affirma qu’il est difficile de réaliser de grands progrès sur la question de l’ozone et sur les autres problèmes environnementaux mondiaux, parce que la société n’a pas encore assimilé l’idée que nous faisons tous partie d’un système planétaire limité. Les connaissances scientifiques et techniques doivent être communiquées au public et aux décideurs politiques, et les liens avec la pauvreté et avec la nécessité de l’éducation et de la promotion de la femme doivent être établis.

Un autre participant nota qu’en dépit de la résistance de l’industrie, voilà une décennie, à l'idée d'éliminer les CFC , les entreprises ont depuis réalisé des gains en termes d’efficacité et sont parvenues aujourd’hui à améliorer leurs relations avec le public. Il s’interrogea sur ce qui pouvait être fait pour amener le monde des affaires à avoir la même attitude vis à vis de la question du changement climatique.

L’idée d’appliquer une taxe écologique aux industries produisant les CFC aux fins d’accroître les disponibilités financières du Fonds Multilatéral fut soulevée. L’un des panélistes répondit que de tels surcoûts retomberont en définitive sur les consommateurs. On suggéra aussi que ces industries soient pénalisées de manière rétroactive pour les préjudices causés à la santé et à l’environnement par la production des CFC. Un panéliste répondit que les entreprises peuvent faire des erreurs, mais qu’en fin de compte elles doivent prendre part à la solution des problèmes. Un autre panéliste déclara que les entreprises doivent être pénalisées pour la vente de technologies dépassées à certains pays en développement, tout en sachant qu’elles seraient bientôt périmées en vertu du Protocole. L’un des participants affirma que le PM est une réussite à l’échelle macro, mais qu'il l’est moins au niveau de la micro-gestion. Une attention accrue doit être accordée au comportement des utilisateurs finaux et à la gestion des déchets. Il souligna que l’interdiction de certaines substances, l'élimination précoce des HCFC et les moyens de détruire les CFC constituaient autant de questions politiques importantes.

La question de savoir comment renforcer le mécanisme de non-conformité au Protocole fut également soulevée. L’un des panélistes nota qu’aucune disposition pour les cas de non respect des règles n’est mise en évidence pour les pays concernés par l’Article 5, et que ces pays souhaitaient pourtant apporter leur contribution. Le bromure de méthyle est dangereux mais reste utilisé à la fois par les pays industrialisés et par les pays en développement, et un accord sur des restrictions est une question d’urgence.

Les participants discutèrent par la suite de la manière dont les expériences du PM pourraient être étendues aux domaines plus complexes de la biodiversité et du changement climatique. Un panéliste souligna que l’élément clé est la volonté politique. Si les gouvernements décidaient, à Kyoto, de faire avancer les choses dans le domaine du changement climatique, ils auront besoin d’instruments flexibles, novateurs et intégrant des préoccupations d’équité, ainsi que de grandes sommes d’argent dont la majeure partie doit provenir du secteur privé. Si le carbone devait devenir une marchandise commercialisée sur le marché mondial, un fonds spécial carbone pourrait être établi pour canaliser le financement vers les pays en développement. S'agissant de la biodiversité, étant donné que le marché ne reconnaît pas la valeur de la biodiversité et des services environnementaux, des mécanismes de financement innovants sont nécessaires pour fournir des incitations économiques aux utilisateurs des ressources à tous les niveaux pour les encourager à préserver la biodiversité.

DOWDESWELL présenta la synthèse du débat et des leçons apprises du Protocole. La volonté politique et l’ingéniosité sont requises pour faire face aux différents challenges mondiaux qui nous sont posés. Une bonne partie de la solution réside dans la coopération et dans la compréhension de l’interdépendance des divers acteurs et du système mondial. Les autres questions environnementales doivent être appréhendées avec la même coopération internationale intensive qui a marqué le PM.

John HOLLINS remercia les panélistes, les participants et les sponsors financiers et clôtura officiellement les travaux du Colloque.

DECLARATION DU COLLOQUE

Un projet de déclaration soulignant les résultats anticipés du Colloque fut distribué aux participants au début de la réunion. Le jour suivant, les participants intéressés tinrent une réunion officieuse consacrée aux commentaires et au parachèvement du texte. La déclaration finale est résumée ci-après.

La déclaration des résultats du Colloque est intitulée "Les Leçons du Protocole de Montréal". La section introductive stipule que le 10ème Anniversaire du Protocole se doit d’être célébré car les résultats démontre que les accords environnementaux internationaux peuvent fonctionner. La déclaration fournit une information générale sur le Colloque et donne un aperçu sur la réussite et les innovations du processus du PM et sur les challenges à venir.

La section intitulée "Les Sciences Naturelles: Ce Que Nous Avons Appris" met en relief les contributions vitales de la science à la réussite du PM, en particulier, dans les domaines du suivi atmosphérique et de l’amélioration de la compréhension des radiations UV. Elle exprime les préoccupations concernant l’incertitude des effets de l’augmentation des radiations UV sur l’écosystème et sur la santé humaine.

La section intitulée "Sciences Sociales: le Succès de la Politique du Protocole" note que d’autres accords internationaux environnementaux peuvent bénéficier des innovations apportées par le PM, lesquelles comprennent: un partenariat basé sur les responsabilités communes mais différenciées; des arrangements dynamiques et flexibles; l’intégration de la science dans la politique; la création de nouvelles institutions telles que le Fonds Multilatéral; et, des transferts financiers et technologiques accompagnés de restrictions commerciales potentielles.

La section intitulée "Technologie: la Nécessité d’Innover" souligne le rôle du PM dans la création des innovations et des opportunités d’affaires et dans la stimulation du développement des alternatives technologiques. Elle identifie la mise en œuvre dans les pays en développement comme étant un challenge pressant.

La dernière section du document, "L’Importance de l’Evaluation: Garder la Politiques à une Certaine Distance", souligne que les évaluations scientifiques, environnementales, techniques et économiques du PM ont facilité l’évolution du Protocole, et note l’importance de leur séparation des considérations politiques et économiques. La section identifie la communication des résultats des évaluations d’une manière intelligible à toutes les Parties prenantes comme étant un challenge à relever.

Cette déclaration des résultats du Colloque devait être présentée à la Neuvième Réunion des Parties du Protocole de Montréal le lundi 15 Septembre 1997.

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