Daily report for 2 July 2014
Le troisième jour du Forum politique de haut niveau sur le développement durable (FPHN-2) sous l’égide du Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC) a débuté par une présentation sur la comptabilisation du capital naturel (CCN) pour le développement durable. Des dialogues modérés ont eu lieu sur deux thèmes: des cloisonnements à l’élaboration de politiques intégrées; et examen des progrès et de la mise en œuvre: tirer profit des vérifications du FPHN après 2015.
PRÉSENTATION SUR LA COMPTABILISATION DU CAPITAL NATUREL POUR LE DÉVELOPPEMENT DURABLE
Le Président de l’ECOSOC Martin Sajdik a présidé cette session. Valerie Hickey, de la Banque mondiale, a estimé que le monde ne peut plus se permettre une croissance en dents de scie reposant sur la liquidation du capital naturel. Elle a décrit les avantages de la CCN dans la promotion de la croissance sans une telle liquidation, en indiquant qu’elle pourrait déplacer le monde de la matrice du PIB vers un accent sur la croissance et le bien-être à long terme. Notant que 70 pays ont soutenu la CCN lors de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable (CCNUCC ou Rio+20), Hickey a plaidé pour une révolution mondiale des données, en estimant que la CCN fournit un cadre adopté au sein du Système des Nations Unies de comptabilisation environnementale et économique, et peut aider les pays à planifier et élaborer des indicateurs pour avancer et évaluer les progrès accomplis vers la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD).
DIALOGUE MODÉRÉ: « DES CLOISONNEMENTS A L’ELABORATION DE POLITIQUES INTEGREES »
Le Président Sajdik a ouvert le dialogue en déclarant qu’il vise à explorer la façon de réorganiser les dispositions institutionnelles traditionnelles pour permettre davantage d’approches collaboratives dans l’élaboration des politiques.
Le Modérateur David Nabarro, Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies à la sécurité alimentaire et à la nutrition, a souligné l’importance de la gouvernance et de l’élaboration de politiques intégrées dans le programme pour l'après-2015, en invitant instamment les participants à dépasser les cloisonnements et favoriser l’intégration pour garantir que l’élaboration des politiques soit « compatible avec les objectifs de gouvernance ».
Joel Netshitenzhe, membre de la Commission nationale de planification d’Afrique du Sud, a estimé que la mentalité cloisonnée entre les États et les agences multilatérales reflète l’hyperspécialisation de l’éducation et des institutions de recherche. Il a recommandé un saut de la coordination vers l’intégration et du « multidisciplinaire au transdisciplinaire ».
L’Ambassadeur Vladimir Drobnjak (Croatie), Vice-Président de l’ECOSOC, a décrit la valeur positive des approches intégrées dans l’élaboration des politiques dans les zones urbaines, ainsi que dans le contexte du changement climatique. Il a souligné: le soutien de la part des gouvernements nationaux; les dispositions et les mécanismes institutionnels appropriés; le renforcement des capacités; la participation du secteur privé et autres parties prenantes de la société civile; et la prise de décisions de façon ascendante pour assurer une approche centrée sur les personnes.
Indomatee Ramma, de l’Institut de la recherche et de l’extension pour l’alimentation et l’agriculture de l’Île Maurice, a présenté un cas d’étude sur la planification de politiques intégrées à l’aide de l’approche aux Ressources climatiques, d’utilisation des terres, en énergie et en eau (CLEW). Elle a souligné une compréhension limitée et fort peu d’intérêt au sein des gouvernements concernant les liens entre les ressources, et a appelé à des cadres institutionnels pour accéder a l’information scientifique, l’interpréter et l’intégrer dans la planification.
L’Ambassadeur Ferit Hoxha (Albanie) a appelé à réfléchir sur: les mesures requises pour développer des stratégies de développement national socialement inclusives, écologiquement rationnelles et économiquement viables; le rôle des ONG dans une approche intégrée du développement durable; et la question de savoir si le système des Nations Unies est en disposition de soutenir la mise en œuvre des ODD. Il a proposé que les Nations Unies élaborent un mécanisme de suivi et de reporting commun et, si possible, unique pour mesurer les progrès accomplis sur la voie du développement durable.
Ousainou Ngum, de l’Agence internationale de coopération et de recherche sur le développement (ACORD), a appelé à un leadership visionnaire et efficace, disposé à prendre des décisions difficiles sur les compromis nécessaires pour parvenir à un développement durable et transformateur. Maria Ivanova, de l’Université du Massachusetts à Boston, aux États-Unis, a partagé son expérience dans la création d’un nouveau programme académique qui entrecroise les disciplines, les échelles et les géographies.
Dans la direction qui a suivi, Netshitenzhe a souligné le besoin d’intégrer les concepts et les pratiques plutôt que se limiter à les coordonner, et a mis en exergue la nécessité d’un leadership décisionnel apte à générer des stratégies à long-terme entre les diverses parties prenantes. Drobnjak a souligné l’importance d’analyser l’information à partir d’angles multiples et d’adopter une approche simplifiée pour la prise de décisions.
Le KENYA a plaidé pour une approche multipartite dans la planification du développement, la collecte de données, et le suivi et l’évaluation, afin de dépasser la mentalité de cloisonnement. La ZAMBIE a noté un problème de nomenclature terminologique entre les disciplines et a appelé à l’harmonisation pour promouvoir une compréhension commune.
L’AFRIQUE DU SUD a mis en exergue son plan national de développement, avec une vision sur 20 de l’éradication de la pauvreté qui dépasse la planification traditionnelle à court terme.
Le Grand groupe des ONG a appelé à des politiques participatives et multipartites qui promeuvent un partage ouverte des données de base. Le Grand groupe des ENTREPRISES ET INDUSTRIES a soutenu les améliorations constantes des modèles de développement durable, en appelant au partage des meilleures pratiques et réussites. La NORVÈGE a évoqué l’utilisation de la planification intégrale pour équilibrer les divers intérêts et de la taxation verte comme approches d’intégration réussies. La CÔTE D’IVOIRE a partagé son expérience de l’élaboration d’une stratégie nationale de développement durable visant à intégrer les trois dimensions du développement durable. L’ALBANIE a estimé qu’une cohérence au niveau système est cruciale pour le développement durable.
Les intervenants ont souligné la gouvernance et la règle de droit comme éléments essentiels d’un développement durable intégré; appelé à des recherches en matière de dispositions institutionnelles aptes à soutenir la planification intégrée du développement national; et appelé les Nations Unies à être vives et concises de façon à fonctionner efficacement.
En conclusion, Nabarro a souligné le besoin de s’éloigner des approches multisectorielles au profit des trans-sectorielles; et d’intégrer les dimensions politiques et informationnelles avec les piliers social, économique et environnemental du développement durable.
DIALOGUE MODÉRÉ: « EXAMEN DES PROGRES ET DE LA MISE EN ŒUVRE: TIRER PROFIT DES VERIFICATIONS DU FPHN APRES 2015 »
L’Ambassadrice María Emma Mejía, Représentante permanente de la Colombie aux Nations Unies, a introduit le panel, en signalant que le FPHN commencera en 2016 à conduire sa vérification périodique du suivi et de la mise en œuvre du développement durable, et que l’Assemblée générale des Nations Unies adoptera en 2015 un cadre de reddition de comptes pour le programme de développement.
L’Ambassadeur Masood Khan, Pakistan, a modéré la discussion. Il a souligné que le programme pour l'après-2015 doit tirer les leçons des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), et inclure les multiples parties prenantes pour renforcer l’intégration.
L’Ambassadeur Christian Wenaweser, Représentant permanent du Lichtenstein aux Nations Unies, a noté qu’une des principales leçons tirées des OMD est le besoin de reddition de comptes et d’un mécanisme efficace de vérification. Il a appelé à un mécanisme volontaire, fondé sur un dialogue constructif, et à un examen des meilleures pratiques issues des autres mécanismes de vérification. Il a également soulevé des questions concernant le champ et la base de la vérification, ainsi que la disponibilité des capacités requises.
L’Ambassadeur Fatuma Ndangiza Nyirakobwa, Présidente du panel de personnalités éminentes, du Mécanisme africain de vérification par des pairs (APRM), a décrit l’APRM comme un mécanisme ouvert, inclusif et à large base chargé de vérifier la gouvernance. Notant que 34 pays d’Afrique ont souscrit à ce mécanisme volontaire, dont 17 se sont prêtés à la vérification par des pairs depuis 2003, elle a indiqué que ceci a permis aux citoyens de formuler leurs inquiétudes concernant, entre autres, la corruption, la gouvernance, la gestion des ressources naturelles, et l’emploi des jeunes. Elle a aussi souligné la participation du secteur privé et de la société civile au mécanisme.
Christian Averous, de la Division de performance et d’information environnementale, Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE), a souligné les leçons tirées des processus de l’OCDE de vérification par des pairs. Il a estimé que le FPHN pourrait améliorer la coopération internationale et les processus nationaux relatifs au développement durable en tirant les enseignements des vérifications de la mise en œuvre par pays conduites par l’OCDE. Il a souligné que le FPHN doit dépasser les intentions et atteindre l’action et les résultats.
Marianne Beisheim, Institut allemand des affaires internationales et sécuritaires, a proposé un modèle de vérification qui, entre autres, est de type ascendant avec une conception multi-niveaux, intègre des vérifications nationales et régionales, et permet une large participation de diverses parties prenantes. Elle a recommandé d’adopter des exigences de reporting compatibles pour éviter la duplication et a suggéré de nommer des gestionnaires spéciaux, suivant l’exemple de l’Équipe de soutien technique des Nations Unies.
Baba Drame, du Ministère de l’environnement et du développement durable du Sénégal, a estimé que le niveau national est le plus approprié pour évaluer la mise en œuvre, et a partagé des exemples et des leçons tirés de trois études du développement durable au Sénégal, en soulignant l’importance des vérifications par des tiers.
Le Grand groupe des TRAVAILLEURS ET SYNDICATS a suggéré deux conditions à minima pour les évaluations nationales: une participation pleine et authentique des parties prenantes clés; et des instruments de responsabilisation pour garantir la tenue des engagements. Le délégué a évoqué comme exemple le mécanisme de supervision de l’Organisation internationale du travail.
Un représentant du Grand groupe ENFANCE ET JEUNESSE a appelé le FPHN: à mettre les bénévoles, les personnes âgées et les handicapés au centre du programme de développement; à adopter une approche de droits humains pour renforcer la légitimité et la responsabilisation; et à s’appuyer sur les processus de vérification existants, tels que l’Examen ministériel annuel de l’ECOSOC et le processus de Vérification universelle périodique du Conseil sur les droits de l’homme.
En réponse à une question sur l’ambiance au cours du processus de vérification paritaire de l’APRM, Nyirakobwa a évoqué un sentiment d’excitation et la possibilité d’aborder des questions considérées comme tabou dans d’autres forums, notamment la corruption, la succession politique et la séparation des pouvoirs. Le CHILI a indiqué que les processus de suivi du mécanisme de vérification de l’OCDE ont permis une meilleure formulation des politiques publiques, et a soutenu la proposition de l’ALLEMAGNE d’avancer sur les moyens de mise en œuvre des ODD.
Le KENYA a appelé à: des vérifications régulières des systèmes de suivi aux niveaux national et infranational; l’intégration des ODD dans tous les processus gouvernementaux; et à donner son importance à la qualité de l’information dans les processus de vérification, notamment pour faciliter la participation des communautés locales.
Appelant le FPHN la nouvelle « plaque tournante » du système onusien pour le développement durable, la SUÈDE a plaidé pour une structure de vérification ascendante qui soit inclusive et a instamment demandé la mise en place du Rapport mondial sur le développement durable comme pilier fort du système de surveillance du FPHN.
La FÉDÉRATION DE RUSSIE a estimé que la vérification ne devrait pas faire doublon avec les efforts de l’ECOSOC; devrait conserver son caractère intergouvernemental; et devrait être guidée par la souveraineté des États et les principes d’égalité de participation; et ne pas devenir un instrument de pression politique.
Le LIBERIA s’est interrogé au sujet du modèle de l’APMR d’adhésion volontaire, et a demandé des informations sur la façon d’encourager plus de pays à participer au mécanisme.
Le Grand groupe des ONG a appelé à une approche multi-étages et inter-pays de la vérification, partant de la base et culminant par la soumission des questions majeures non résolues au processus de vérification du niveau international.
En réponse aux commentaires, Averous a souligné l’importance de positionner les examens dans un contexte plus large de compréhension économique des réalités mondiales. Nyirakobwa a souligné qu’il n’existe pas de processus de vérification prêt-à-porter, et a appelé le FPHN à centrer son examen de vérification sur le mandat de l’ECOSOC.
Dans ses remarques de conclusion, Khan a estimé qu’il y a un clair soutien à l’idée que le processus de vérification soit un exercise volontaire. Il a également suggéré que le FPHN entame ses travaux sans attendre que les ODD soient finalisés.
L’Ambassadrice Mejía a conclu la session en remerciant les participants pour leurs contributions.
DANS LES COULOIRS
Avec l’intégration à l’ordre du jour, ce n’était qu’une question de temps avant que le miroir ne se retourne sur l’Organisation des Nations Unies, les participants discutant de son rôle dans la fabrication et la destruction des cloisonnements. Les intervenants ont appelé à une ONU « vive et concise » pour conduire un changement transformateur. L’intégration et le démantèlement des cloisonnements tombent souvent dans la redondance, mais –comme l’a dit un des intervenants– essayer de conduire un changement transformateur par le haut revient à « demander à la dinde de voter pour Noël ». L’ONU est-elle enfin prête pour une transformation ? Elle commence à sentir la pression, d’après quelques participants, et il y a beaucoup en jeu dans le succès du processus post-2015 –et dans la réussite du FPHN à le conduire. Ils signalent également qu’il y a une grosse différence entre « orchestration » et « intégration ». Comme l’a exprimé l’un des intervenants, il est temps pour l’ONU et ses États membres de faire preuve d’un puissant leadership.
Ce numéro du Bulletin des Négociations de la Terre © <enb@iisd.org> a été rédigé par Rishikesh Ram Bhandary, Tallash Kantai, Anju Sharma, et Catherine Wahlén, Ph.D. Version française: Alexandra Lefevre. Editrice en chef: Pamela S. Chasek, Ph.D. <pam@iisd.org>. Directeur du Service des informations de l’IIDD: Langston James “Kimo” Goree VI <kimo@iisd.org>. Les bailleurs de fonds du Bulletin sont: la Commission européenne (DG-ENV et DG-CLIMAT) et le Gouvernement de la Suisse (l’Office fédéral suisse de l’environnement (OFEV) et l’Agence suisse pour la coopération au développement (DDC)). Un soutien général est accordé au Bulletin, au titre de l’exercice 2014, par: le ministère fédéral allemand de l’environnement, de la préservation de la nature, du bâtiment et de la sécurité nucléaire (BMUB), le ministère néo-zélandais des affaires étrangères et du commerce extérieur, SWAN International, le ministère finlandais des affaires étrangères, le ministère nippon de l’environnement (à travers l’Institut des stratégies environnementales mondiales - IGES), le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), et le Centre de Recherche pour le développement international (CRDI). Un financement spécifique pour la couverture de cette réunion a été fourni par le Ministère fédéral allemand de l’environnement, de la conservation de la nature, de la construction et de la sûreté nucléaire. Le financement pour la traduction du Bulletin en français a été fourni par le gouvernement de la France, la Wallonie, le Québec et l’Organisation internationale de la francophonie/Institut de la francophonie pour le développement durable (OIF/IFDD). Les opinions exprimées dans le Bulletin appartiennent à leurs auteurs et ne reflètent pas forcément les vues de l’IIDD et des bailleurs de fonds. Des extraits du Bulletin peuvent être utilisés dans des publications non commerciales moyennant une citation appropriée. Pour tout renseignement, y compris les demandes de couverture d’événements par nos services, contacter le Directeur du Service des informations de l’IIDD, <kimo@iisd.org>, au +1-646-536-7556 ou par courrier au 320 E 46TH ST., NEW YORK NY 10017-3037.11D, New York, New York 10022, USA. L’équipe du BNT présent au FPHN-2 peut être contacté par email à l’adresse suivante: <anju@iisd.org>.