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Daily report for 12 October 2015

La douzième réunion de la Conférence des Parties à la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification (CLD CdP 12) s’est ouverte à Ankara, en Turquie, dans l’après-midi de lundi 12 octobre 2015. Après les réunions des groupes régionaux dans la matinée, la plénière d’ouverture a donné aux délégués l’opportunité d’échanger des déclarations d’ouverture concernant les points à l’ordre du jour de la CdP12 ainsi que leurs attentes vis-à-vis de la Conférence.

PLÉNIÈRE D’OUVERTURE

Priant les délégués d’observer une minute de silence, Pohamba Shifeta, Ministre de l’environnement et du tourisme de Namibie et Président de la CdP11, a ouvert la CdP12 en exprimant sa solidarité avec les personnes touchées par les récentes attaques survenues à Ankara. Soulignant que la gestion durable des pâturages est une priorité centrale pour son pays, il a indiqué que la récente adoption des Objectifs de développement durable (ODD) contribuera à élever le profil des questions relatives à la Désertification, la dégradation des terres et la sècheresse (DDTS) dans les affaires politiques, et a appelé à consacrer des ressources suffisantes pour parvenir à l’objectif d’un monde neutre en dégradation des terres (NDT).

Les délégués ont ensuite élu Veysel Eroğlu, Ministre des forêts et des affaires relatives à la ressources en eau, Président de la CdP 12. Eroğlu a souligné que les changement climatiques, la désertification et la sécheresse sont parmi les plus grands défis du monde d’aujourd’hui, car ils touchent 1,5 milliards de personnes. Il a mis en exergue les efforts de la Turquie pour améliorer la gestion durable des terres (GDT), y compris la campagne nationale de reboisement intitulée « un arbrisseau par personne » et l’initiative « Le chemin d’Ankara » visant à engager la communauté des entreprises, et a signalé la volonté de son pays de partager son expertise avec d’autres pays afin d’atteindre les objectifs de NDT.

Melih Gökçek, Maire d’Ankara, a identifié les efforts visant à améliorer les espaces verts de la ville par habitant et a noté que, lorsqu’il est arrivé à la Mairie en 1994, Ankara avait environ deux mètres carrés d’espaces verts par habitant mais ce ratio a substantiellement augmenté tandis que la population a doublé au cours de la même période. Il a partagé une vidéo montrant les efforts de lutte contre la désertification et d’élargissement des espaces verts dans la ville et dans la province d’Ankara.

Monique Barbut, Secrétaire exécutive de la CLD, a affirmé que la Convention est une « organisations en mouvement » et a signalé la reconnaissance croissante du rôle des terres dans les négociations relatives aux changement climatiques. Elle a mis en exergue les « ambitieuses décisions » requises de la part de la CdP12 pour faire de la NDT une cible quantifiable servant de guide à la Convention dans les 15 prochaines années, et a noté l’importance de mettre en place de meilleurs moyens de mesurer les progrès accomplis, y compris en réduisant la fréquence des rapports nationaux. Barbut a appelé à la souplesse pour adopter un budget nominal à croissance nulle, mais a mis en garde contre la prise d’engagements que ne soient pas liés à des financements additionnels.

Nicolas Hulot, Conseiller spécial auprès du Président français, a affirmé que le succès de la Conférence de Paris sur les changement climatiques dépend de trois facteurs: l’humilité, la solidarité et la vérité. Il a souligné le besoin de reconnaître que: vivre en harmonie avec la nature est une force; que la désertification et les changement climatiques sont liés; et qu’un modèle économique fondé sur la coopération, la justice et le commerce équitable doit être développé. Il a rappelé le message du Pape François concernant les trois besoins primaires, « le travail, le logement et la terre », qui peuvent tous trois être impactés par les aléas climatiques extrêmes, a-t-il affirmé.

DÉCLARATIONS DES GROUPES RÉGIONAUX, DES GROUPEMENTS D’INTÉRÊTS ET DES INSTANCES DE L’ONU: L’Afrique du Sud, s'exprimant au nom Groupe des 77 et la Chine (G-77/Chine), a salué la prépondérance des questions relatives à la DDTS dans les ODD, a considéré que l’objectif de la NDT d’ici à 2030 va « changer la donne », en signalant que cela permettrait aux pays de travailler sur d’autres objectifs comme la sécurité alimentaire, la pauvreté, la santé, la biodiversité et les changement climatiques. Le délégué a estimé que la CLD peut désormais se présenter comme un instrument rentable et efficace pour relever ces défis. Attirant l’attention sur la Conférence de Paris sur les changement climatiques à venir, il a appelé à envoyer un message fort de cette CdP12 sur les approches fondées sur les territoires pour lutter contre le changement climatique.

Le Luxembourg, au nom de l’Union européenne (UE), a signalé que la DDTS reste un phénomène mondial complexe et largement sous-estimé, en citant les estimations de l’Initiative de l’Économie de la dégradation des terres (EDT) selon lesquelles 50 millions de personnes pourraient être forcées d’émigrer dans les 50 prochaines années. Il a salué l’inclusion d’un objectif spécifique et d’une cible sur la NDT dans le Programme de développement durable 2030, et a souligné les liens avec d’autres objectifs et cibles internationaux, notamment: la reconnaissance de l’autonomisation des femmes dans le développement durable telle que contemplée dans le Programme d’action d’Addis-Abeba; les efforts des trois Convention de Rio et du Fonds pour l’environnement mondial (FEM) visant à élaborer des indicateurs communs de progrès et à renforcer les synergies de leurs programmes de mise en œuvre; et les travaux de l’Interface science-politique (ISP) de la Convention visant à améliorer la coordination avec d’autres groupes scientifiques.

L’Afrique du Sud, au nom du GROUPE AFRICAIN, a salué l’adoption de la cible relative à la NDT dans le cadre des ODD et a souligné le besoin d’une double approche pour parvenir à un monde neutre en dégradation des terres d’ici à 2030, y compris les pratiques de GDT et la réhabilitation des terres déjà dégradées à travers un élargissement des ressources en financements et en technologie, ainsi qu’au moyen de synergies renforcées entre partenaires. La déléguée a appelé à des discussions ouvertes sur l’intégration de la cible NDT dans les décisions de la CdP12.

L’Inde, au nom du GROUPE ASIE PACIFIQUE, a souligné le besoin pour la CdP12 de garantir que les actions visant à mettre en œuvre les ODD et la CLD soient renforcées à tous les niveaux et que le rôle des approches territoriales dans l’adaptation et l’atténuation des changement climatiques reçoive l’attention qu’il mérite lors de la Conférence de Paris les changement climatiques. Le délégué a ajouté que la fréquence des réunions des organes de la Convention ne devrait pas être réduite, du moins pas avant que les impacts des processus relatifs aux ODD et aux changements climatiques sur la CLD n’aient été clarifiés. Il a signalé le besoin de mesures spécifiques et de ressources appropriées pour traiter les questions de poussière et de tempêtes de sable, ainsi que le besoin de ressources accrues pour le Mécanisme mondial de la CLD (MM) et le FEM.

Saint-Vincent et les Grenadines, au nom du groupe de pays d’Amérique Latine et des Caraïbes (GRULAC), a souligné que la région renferme certes de riches écosystèmes, mais qu’elle est aussi vulnérable à la DDTS et aux phénomènes tels que El Niño. Reconnaissant que le concept de NDT a été entériné comme partie intégrante du Programme de développement durable 2030, le délégué a appelé à sa clarification, et à déterminer la méthodologie et les indicateurs connexes. Il s’est dit préoccupé par la proposition de restructurer le CRIC et déçu du manque de soutien reçu par le GRULAC dans l’organisation de sa réunion préparatoire régionale.

Portugal, au nom de l’ANNEXE DE LA MÉDITERRANÉE DU NORD, a noté que chaque Partie est touchée de façon différente et a des capacités qui lui sont propres. Le délégué a déclaré que les Parties de l’Annexe IV sont disposées à éliminer les libellés entre crochets dans le projet de définition de la NDT, et a soutenu l’établissement d’une cible volontaire sur la NDT.

Armenia, au nom de l’EUROPE CENTRALE ET DE L’EST (CEE), a souligné que la CdP12 est importante au regard des ODD, notamment concernant la NDT, et a noté que Rio+20 a appelé la CLD à se poser en autorité mondiale de la dégradation des terres et de la GDT. Le délégué a reconnu le travail du Groupe de travail intergouvernemental (GTI) sur la NDT. Il a soutenu la suppression des crochets dans le texte relatif à la définition de la NDT et a signalé qu’une cible connexe demanderait des ressources financières significatives. Il a également salué les résultats de la 3e Conférence scientifique de la CLD et a appelé à tenir de nouvelles conférences scientifiques.

Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a décrit l’approche du PNUD pour soutenir la GDT à travers: le renforcement des capacités, la défense et le conseil politique; l’adoption et la démonstration de technologies et d’approches appropriés aux contextes locaux; et l’assistance prêtée aux pays pour leur permettre d’accéder à des financements environnementaux pour la GDT.

Le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) a mis en exergue sa coopération avec la CLD à travers des initiatives telles que le Partenariat pour le verdissement des zones arides et les Paysages pour les personnes, l’alimentation et la nature. La déléguée a également attiré l’attention sur le portefeuille actuel de projets mondiaux de GDT que détient le PNUE à hauteur de 70,5 millions USD.

La Fondation TEMA, Turquie, s'exprimant au nom des Organisations de la société civile (OSC), a signalé que les modèles non durables de développement exercent une pression immense sur les sols et contribuent à accroître la pauvreté, les déplacements de populations et les perturbations civiques. Saluant l’accent mis sur les sols et l’inclusion du concept de NDT dans les ODD, la déléguée a souligné le besoin de clarifier les questions relatives à la mesure des impacts, à l’équité et à la gouvernance. Elle a souligné que le mécanisme de financement pour la NDT devrait « permettre aux communautés d’améliorer la gestion des terres et ne pas promouvoir le transfert des terres à des tiers », et a appelé à mettre en place des partenariats public-privé pour adhérer aux Directives volontaires de l’Organisation des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO) pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts (Directives volontaires).

La FAO a décrit les activités en réponse à la dégradation des terres et à la raréfaction de l’eau, notamment: l’approche « Sauver et cultiver » pour l’intensification de la production durable; les approches intégrées de gestion des paysages et le soutien à l’initiative de la Grande muraille verte du Sahara et du Sahel; l’élaboration d’indicateurs pour la NDT; une nouvelle vision de la foresterie d’ici à 2050; les orientations pour la réhabilitation des terres dégradées et des sols dans les zones arides; les Directives volontaires; et le Partenariat mondial des sols.

ADOPTION DE L’ORDRE DU JOUR ET ÉLECTION DU BUREAU: Les délégués ont adopté l’ordre du jour et l’organisation des travaux avec des amendements mineurs présentés oralement (ICCD/COP(12)/1 et Add.1).

Les délégués ont élu les candidats suivants comme Vice-Présidents de la CdP12: Skumsa Mancotywa (Afrique du Sud) et Jean Muneng (République démocratique du Congo) pour l’Afrique; Ashot Vardevanyan (Arménie) et Vesna Indova (Ancienne république yougoslave de Macédoine) pour la CEE; Felipe Costa (Brésil) et Haendel Sebastian Rodríguez Gonzáles (Colombie) pour le GRULAC; et Grammenos Mastrojeni (Italie) et un représentant de la Turquie pour l’Europe de l’Ouest et autres États.

Les délégués ont ensuite établi un Comité d’ensemble (COW) pour examiner les points suivants de l’ordre du jour: Programme de développement pour l’après-2015: incidences pour la CLD; Mise en œuvre efficace de la Convention; Programme et budget; et les Questions de procédure, notamment la demande soumise par les pays Parties visés à l’Annexe V concernant le mandat et le champ d’application de la Convention.

Les délégués ont également adopté le document relatif à l’accréditation des organisations intergouvernementales et non gouvernementales et à l’admission des observateurs (ICCD/COP(12)/15), en notant, entre autres, que 314 OSC ont été accréditées pour participer à la CdP12.

DANS LES COULOIRS

Lorsque les participants exprimaient leur solidarité à la Turquie du fait de l’attaque terroriste survenue à Ankara la veille de la CdP12, certains ont indiqué que cet événement renforçait leur détermination à travailler ensemble pour aborder les questions liées à la DDTS à travers le programme de la CdP12. D’autres ont fait preuve d’un enthousiasme renouvelé à s’engager sur la Convention, né de l’inclusion de la NDT et d’autres cibles liées aux terres dans les ODD récemment adoptés, ainsi que des synergies avec le programme de l’imminente Conférence de Paris sur les changements climatiques et avec les objectifs de la Convention sur la diversité biologique. Certains ont signalé que, si bien les OMD n’incluaient pas de questions relatives aux terres, plusieurs cibles des ODD exigent, quant à elles, d’aborder ces questions. Ils ont salué ce qu’ils considèrent comme une opportunité de repositionner la CLD dans les affaires internationales relatives au développement –connexion qui s’est avérée difficile à saisir jusqu’à présent, ont-il affirmé. Néanmoins, nombreux étaient ceux convaincus qu’il va falloir travailler d’arrache-pied pour tirer profit de cette opportunité, car les discussions sur la NDT entraîneront certainement des discussions sur la portée de la Convention et sur d’autres questions délicates. Les représentants de la société civile, par exemple, ont averti que donner au secteur privé un rôle plus important dans les investissements liés à la NDT pourrait aggraver le déplacement de communautés rurales. Les discussions sur ces questions ont été mises en veilleuse dans la soirée, lorsque les délégués sont allés savourer un généreux buffet de spécialités turques offert par leurs hôtes et se préparer ainsi à entamer les négociations.

Participants

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