Daily report for 10 July 2010
Les délégués à la réunion de reprise de la neuvième session du Groupe spécial à composition non limitée sur l’accès et le partage des avantages (ABS) de la Convention sur la diversité biologique (CDB) se sont réunis, le matin, en séance plénière, pour entendre les déclarations régionales et traiter les questions d’organisation, y compris la reprise du groupe de négociation interrégional mis en place au cours de la première partie de la réunion, à Cali, en Colombie. L’après-midi, le groupe interrégional a commencé à négocier le projet de protocole, article par article.
LA SEANCE PLENIERE
Le coprésident du Groupe de travail, Timothy Hodges (Canada), a accueilli les délégués et a remercié : le Japon pour le financement de la session de reprise de l’A&PA 9, le Canada, l’Espagne et la Suisse, pour le financement de la participation des pays en développement, et la Norvège, pour le financement de la couverture de l’évènement par le ENB, soulignant son importance pour la transparence du processus. Dans un message vidéo, l’ambassadeur de bonne volonté des Nations Unies pour la biodiversité, Edward Norton, a rappelé aux délégués que tous doivent accepter la responsabilité particulière d’agir maintenant pour éviter une perte irréversible de la biodiversité. Le coprésident du Groupe de travail, Fernando Casas (Colombie), a déclaré qu’il s’attend, de la part des délégués, à un engagement de haut niveau permettant de parvenir à un accord définitif. Faisant état des réussites antérieures enregistrées dans les négociations de la CDB, tenues à Montréal, Hodges a appelé à des négociations de bonne foi, menées dans un esprit de compromis, et a souligné que le report de questions difficiles à résoudre par la Conférence des Parties (COP) n’est pas une option.
L’ambassadeur de la CdP 10, Kiyoshi Araki (Japon), a appelé les délégués à engager des négociations fondées sur des textes et à s’attaquer aux questions difficiles, de sorte que les questions en suspens puissent être résolues à travers la participation des ministres à la CdP 10. Le Brésil, au nom des PAYS MEGA-DIVERS AUX VUES SIMILAIRES (PMDVS), a souligné la nécessité de maintenir l’intégrité du projet de protocole figurant à l’Annexe de Cali (UNEP/CBD/WG-ABS/9/3, Annexe I). Il a indiqué qu’un équilibre doit être atteint dans la négociation de chaque article, soulignant l’importance de l’intégration des produits dérivés et d’un traitement approprié des savoirs traditionnels (ST). Le Malawi, au nom du GROUPE AFRICAIN, et le Mexique, au nom du GROUPE DES PAYS D’AMERIQUE LATINE ET DES CARAÏBES (GRULAC), a réitéré la nécessité d’un protocole juridiquement contraignant sur l’A&PA. Le GROUPE AFRICAIN a appelé à des règles d’engagement claires pour les négociations.
La Serbie, au nom du GROUPE DES PAYS DE L’EUROPE CENTRALE ET ORIENTALE (PECO), a accordé la priorité : à un instrument juridiquement contraignant portant sur l’utilisation des ressources génétiques et leurs dérivés, le respect des obligations, le renforcement des capacités et le partage des avantages, en tenant compte des conservation et utilisation durables ; et à l’harmonie avec d’autres processus menées dans d’autres instances internationales. L’ARABIE SAOUDITE a mis l’accent sur le transfert de technologie.
La Nouvelle-Zélande, au nom du GROUPE DE FEMMES AUX VUES SIMILAIRES, a souligné la nécessité de rendre compte d’une perspective sexo-spécifique dans le texte du régime international, et de s’assurer de la participation pleine et effective des femmes à tous les niveaux de l’élaboration des politiques et de la mise en œuvre des objectifs de la CDB. La Malaisie, au nom du GROUPE DES PAYS EN DÉVELOPPEMENT DE LA REGION ASIE-PACIFIQUE AUX VUES SIMILAIRES, a mis en exergue le respect des obligations comme étant la raison d’exister et la valeur ajoutée d’un protocole sur l’A&PA. L’UNION EUROPEENNE (UE) a appelé à un équilibre entre les droits et les obligations au sein de l’instrument, ainsi que par rapport à d’autres instruments internationaux.
QUESTIONS D’ORGANISATION : Le coprésident Hodges a expliqué que les membres du Bureau de la réunion restent tels qu’ils ont été élus à Cali, le Bureau de la CdP siégeant en tant que Bureau de la réunion et Somaly Chan (Cambodge) en tant que rapporteur de la réunion. Le Groupe de travail a ensuite adopté l’ordre du jour (UNEP/CBD/WG-ABS/9/1/Rev.1).
Au sujet de l’organisation des travaux, Hodges a proposé que les négociations se poursuivent sur la base de l’Annexe de Cali, dans le but d’améliorer les formulations consensuelles. Il a suggéré de réunir de nouveau le groupe de négociation interrégional formé à Cali, pour travailler dans un format de table ronde, comprenant : cinq représentants de chacune des régions des Nations Unies, deux représentants pour les communautés autochtones et locales, deux pour la société civile, deux pour l’industrie et deux pour la recherche publique, et les représentants des présidences actuelle et prochaine de la CdP. Il a précisé que porte-parole et représentants peuvent changer librement et que les débats seront ouverts à la participation de tous les participants du groupe de travail. Le Groupe de travail a approuvé la reprise du groupe interrégional, qui sera coprésidé par les coprésidents du Groupe de travail.
Le coprésident Casas a ensuite présenté les règles d’engagement, selon lesquelles : les parties sont censées commencer à négocier le projet de protocole, article par article, et un article sera considéré comme accepté si aucune objection n’est formulée, en gardant à l’esprit que rien n’est convenu tant que tout ne l’est pas. Appelant les parties à "faire preuve de retenue" et à proposer des textes tenant également compte des vues des autres, il a suggéré de recourir aux crochets lorsqu’il n’y a pas de compromis, en vue d’un réexamen à un stade ultérieur. Il a proposé que: le groupe interrégional traite les Articles 1 à 19, à l’exception de l’utilisation des termes (Article 2), au cours des trois prochains jours, qu’une séance plénière ait lieu le mardi 13 Juillet 2010 pour évaluer les progrès et que le groupe interrégional reprenne ses travaux pour finaliser les négociations, y compris celles du préambule, de l’utilisation des termes et des clauses finales (Articles 20 à 31).
Répondant à des questions posées par le Canada, le coprésident Casas a précisé que les délégués peuvent proposer de nouveaux libellés ou des libellés fondés sur les soumissions enregistrées dans le rapport de la réunion de Cali, mais qu’ils doivent expliquer comment cela va améliorer le projet de protocole. En réponse à une question posée par l’UE, il a confirmé que les parties peuvent placer entre crochets des articles entiers. Dans sa réponse aux préoccupations exprimées par le Brésil, Casas a rappelé que les parties ne devraient pas proposer des formulations qui ne reflètent que leurs propres positions, car cela risque d’aboutir à un texte lourdement crocheté plutôt qu’à un texte de compromis.
LE GROUPE DE NEGOCIATION INTERREGIONAL
OBJECTIF (ARTICLE 1) : Le GRULAC, les PECO et les PMDVS ont apporté leur appui au texte dans sa forme actuelle, consacré à la garantie du partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques, les PHILIPPINES demandant d’y ajouter les produits dérivés. L’UE et la REPUBLIQUE DE COREE ont proposé d’y ajouter une référence à la facilitation de l’accès aux ressources génétiques. Le GROUPE AFRICAIN, appuyé par le GRULAC, a proposé, au lieu de cela, d’utiliser le libellé du troisième objectif de l’Article 1 de la CDB (Objectifs). La NOUVELLE ZELANDE a souligné l’interdépendance des objectifs de la CDB, le CANADA proposant de préciser que l’objectif est plutôt le partage des avantages que la "garantie" du partage des avantages, et d’ajouter, à la fin de l’article, une référence à la contribution aux premier et deuxième objectifs de la CDB. Les délégués ont convenu que l’objectif du protocole est "le partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques, notamment à travers un accès approprié aux ressources génétiques et un transfert approprié des techniques pertinentes, en tenant compte de tous les droits sur ces ressources et ces technologies, et à travers un financement approprié, contribuant ainsi à la conservation de la diversité biologique et à l’utilisation durable de ses éléments.”
CHAMP D’APPLICATION (ARTICLE 3): Les PMDVS, les PAYS D’ASIE-PACIFIQUE AUX VUES SIMILAIRES et l’EUROPE CENTRALE ET ORIENTALE ont demandé une référence aux produits dérivés. La NOUVELLE ZELANDE a fait objection à l’extension du champ d’application aux ressources biologiques, dérivés et produits. La NORVEGE a suggéré que les dérivés soient couverts par la référence à "toutes les utilisations" des ressources génétiques.
L’UE a proposé que le protocole s’applique aux ressources génétiques acquises après l’entrée en vigueur du protocole, le JAPON et la NOUVELLE ZELANDE s’opposant à l’application rétroactive du protocole. Le GROUPE AFRICAIN a déclaré que les utilisateurs ont l’obligation morale de partager les avantages tirés des nouvelles utilisations et de celles en continuation, ajoutant que la couverture des utilisations après l’entrée en vigueur du protocole ne suggère pas la rétroactivité. La NORVEGE a proposé que les parties "encouragent" les utilisateurs à le faire. Les PAYS D’ASIE-PACIFIQUE AUX VUES SIMILAIRES et le PEROU ont rappelé aux délégués qu’il y a une obligation de partage des avantages depuis l’entrée en vigueur de la CDB.
Le CANADA a proposé d’exclure du champ d’application du protocole: les ressources génétiques situées au-delà de la juridiction nationale, les ressources génétiques relevant de l’Annexe I du Traité international sur les ressources phytogénétiques destinées à l’alimentation et à l’agriculture (TIRPG), pour les parties de la CDB qui sont parties au TIRPG, les ressources génétiques, lorsque "elles sont utilisées uniquement comme une matière première", et les savoirs traditionnels associés aux ressources génétiques acquises avant l’entrée en vigueur du protocole. Le GROUPE AFRICAIN a mis en garde contre l’atteinte à l’intégralité du régime de la CDB et contre la violation de l’Article 3, sur la responsabilité des Etats de s’assurer que les activités relevant de leur juridiction ou contrôle ne causent pas de dommages à l’environnement des zones situées au-delà de la juridiction nationale, et a recommandé d’étendre le champ d’application aux adhésions pré-CDB aux fins de s’assurer de la couverture des collections ex situ. L’UE a suggéré l’exclusion des ressources génétiques situées au-delà des limites de la juridiction nationale ou de celles situées dans la zone du Traité, et d’aborder la question de la relation avec le Traité et le problème des agents pathogènes, dans une disposition distincte consacrée à la relation avec d’autres instruments.
Le CANADA a proposé d’exclure les ressources génétiques humaines. Le GROUPE AFRICAIN a préféré plutôt un réexamen de la décision II/11 COP (accès aux ressources génétiques) qui réaffirme que les ressources génétiques humaines ne sont pas incluses dans le cadre de la CDB, que le traitement de cette question dans le protocole. L’AUSTRALIE, contrée par le GROUPE AFRICAIN, a attiré l’attention sur les agents pathogènes humains comme élément possible à exclure. La NOUVELLE ZELANDE a suggéré d’aborder les ressources génétiques et agents pathogènes humains dans un autre article, et la NORVEGE a suggéré que les ressources humaines fassent l’objet d’une décision de la CdP.
Le coprésident Casas a proposé de plutôt faire référence aux ressources génétiques dans le cadre de la Convention, que de rédiger une liste d’éléments à inclure et à exclure. La NORVEGE et la NOUVELLE-ZELANDE ont suggéré que les ressources génétiques situées dans les zones au-delà de la juridiction nationale sont couvertes par l’article 4 de la CDB (Champ d’application), alors que le GROUPE DES PAYS D’ASIE-PACIFIQUE AUX VUES SIMILAIRES a soutenu qu’elles sont couvertes par l’article 22.2 (mise en œuvre conformément à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer). Le JAPON a proposé de traiter les exclusions dans d’autres articles. Le CANADA a expliqué que les exclusions sont nécessaires pour la sécurité juridique et qu’elles ne sont pas destinées à limiter la portée du protocole.
La NOUVELLE ZELANDE a proposé, comme texte rationalisé, que le protocole s’applique aux ressources génétiques et savoirs traditionnels associés dans le cadre de la CDB, acquis après l’entrée en vigueur du protocole, et aux avantages découlant de l’utilisation de ces ressources et savoirs. Après discussion, la proposition n’a pas été retenue. Les négociations se poursuivront dimanche.
DANS LES COULOIRS
Conscients du fait qu’il s’agit là de la réunion "de la réussite ou de l’échec" du Groupe de travail sur l’A&PA - la toute dernière chance de négocier un instrument sur l’A&PA, pour adoption à la CdP 10 – les délégués se sont finalement engagés dans des négociations portant sur les libellés du projet de protocole. Cependant, les acclamations qui ont éclaté au moment où le groupe s’est accordé sur le premier article, se sont avéré être dues davantage au dernier but marqué à la petite finale de la Coupe du Monde, qu’au consensus atteint sur le texte, en puisant dans l’Article 1 de la CDB. N’empêche, ce premier pas vers le consensus a marqué un changement dans l’atmosphère des négociations, car ce compromis avait déjà été proposé mais non accepté. De nombreux délégués y ont, de manière générale, puisé une réassurance que surmonter quelques-unes des nombreuses questions en suspens, est possible, grâce à une attitude renouvelée de collaboration nourrie par des règles d’engagement plus claires. D’autres ont souligné les écueils qui restent à franchir, comme les postes de contrôle, le champ d’application temporel et le lien avec d’autres accords, notant que, comme dans le football, une avance par un but à zéro ne signifie nullement que l’on a gagné la partie.
A l’heure où les délégués se rendaient à la réception du soir, les couloirs débordaient de supputations au sujet de la finale de la Coupe du Monde, dimanche. La plupart des délégués semblaient parier sur l’Espagne, conformément à la prévision de ‘Paul le Poulpe‘, un céphalopode à l’incroyable nombre de prédictions avérées des résultats des matchs de la Coupe du monde. Le don de claire prédiction de Paul a un potentiel commercial qui a conduit certains à se demander si cela ne risquait pas de changer les positions concernant l’inclusion de la biodiversité marine située dans les zones au-delà de la juridiction nationale dans le champ d’application du protocole.
Ce numéro du Bulletin des Négociations de la Terre © <enb@iisd.org> a été rédigé par Stefan Jungcurt, Ph.D., Elisa Morgera, Ph.D., Nicole Schabus, et Elsa Tsioumani. Version française: Mongi Gadhoum. Editrice en chef: Pamela S. Chasek, Ph.D. <pam@iisd.org>. Directeur du Service des informations de l’IIDD: Langston James “Kimo” Goree VI <kimo@iisd.org>. Les bailleurs de fonds du Bulletin sont: Le Royaume-Uni (à travers le département du développement international (DFID), le gouvernement des Etats-Unis d’Amérique (à travers le Bureau des océans et des affaires environnementales et scientifiques internationales du département d’Etat américain), le gouvernement du Canada (à travers l’ACDI), le ministère danois des affaires étrangères, le ministère allemand de la coopération économique et développement (BMZ), le ministère fédéral allemand de l’environnement, de la préservation de la nature et de la sécurité nucléaire (BMU), le ministère néerlandais des affaires étrangères, la commission européenne (DG-ENV), et le ministère italien de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’espace maritime. Un soutien général est accordé au Bulletin, au titre de l’exercice 2010, par: le ministère norvégien des affaires étrangères, le gouvernement australien, le ministère fédéral autrichien de l’agriculture, des forêts, de l’environnement et de la gestion de l’eau, le ministère suédois de l’environnement, le ministère néo-zélandais des affaires étrangères et du commerce extérieur, SWAN International, l’Office fédéral suisse de l’environnement (FOEN), le ministère finlandais des affaires étrangères, le ministère nippon de l’environnement (à travers l’IGES), le ministère nippon de l’économie, du commerce et de l’industrie (à travers GISPRI), le gouvernement d’Islande, le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), et la Banque mondiale. Un financement spécifique pour cette réunion a été fourni par le ministère norvégien des affaires étrangères et le ministère japonais de l’environnement. Le financement pour la traduction du Bulletin en français a été fourni par les gouvernements de la France, de la Région wallonne de Belgique, de la Province du Québec et de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF et IEPF). Le financement de la version espagnole du Bulletin est financée par le ministère espagnole de l’environnement et des affaires rurales et marines. Les opinions exprimées dans le Bulletin appartiennent à leurs auteurs et ne reflètent pas forcément les vues de l’IIDD et des bailleurs de fonds. Des extraits du Bulletin peuvent être utilisés dans des publications non commerciales moyennant une citation appropriée. Pour tout renseignement, y compris les demandes de couverture d’événements par nos services, contacter le Directeur du Service des informations de l’IIDD, <kimo@iisd.org>, au +1-646-536-7556 ou par courrier au 300 East 56th St., 11A, New York, New York 10022, USA. L’équipe du BNT couvrant la session de reprise sur l’APA 9 est joignable par courriel à <elsa@iisd.org>.